January 21, 2025
Allemagne

L'Église catholique, messagère de paix dans la tourmente des Grands Lacs

Lors de la neuvième session de la série de conférences interdisciplinaires internationales organisées par  l’Université de Fribourg dans le cadre du projet Girubuntu Peace Academy, Monseigneur Simon Ntamwana, figure emblématique de la paix au Burundi et dans la région des Grands Lacs, a souligné le rôle crucial de l’Église catholique dans les efforts de réconciliation, tout en déplorant l’obstacle que représentent les politiciens pour la paix en Afrique et au Burundi, son pays.

Le Burundi, pays au cœur de la région des Grands Lacs africains, porte encore les cicatrices de son histoire tumultueuse. Depuis son indépendance dans les années 1960, le pays a traversé des crises majeures, notamment en 1972 et 1993, qui ont profondément marqué son tissu social. L’assassinat du président Melchior Ndadaye en 1993 a plongé le pays dans une spirale de violence, déclenchant une guerre civile qui a mis à l’épreuve la résilience de la nation.

Dans ce contexte de chaos, l’Église catholique s’est imposée comme un pilier de stabilité et un vecteur de paix. Face à l’effondrement des structures politiques traditionnelles et à la montée des tensions ethniques, l’Église a pris l’initiative d’intervenir pour rétablir la paix au sein de la population. Cette action s’est révélée cruciale à un moment où l’armée, impliquée dans le déclenchement des événements, était incapable de protéger les civils contre les représailles.

L’approche de l’Église s’est caractérisée, souligne Monseigneur Ntamwana, par sa volonté de transcender les clivages ethniques et politiques. Reconnaissant les limites du système des partis politiques dans la résolution du conflit, les leaders ecclésiastiques ont initié un processus de négociation innovant. Ils ont cherché à rassembler les principaux dirigeants dans des discussions privées, axées sur le partage équitable du pouvoir et la prise en compte des intérêts de chaque groupe.

Ces efforts ont contribué de manière significative à l’élaboration de l’accord d’Arusha en août 2000, une étape cruciale dans le processus de paix burundais. Parallèlement, l’Église catholique a joué un rôle majeur dans la gestion de la crise des réfugiés dans les pays voisins.

L’engagement de l’Église ne s’est pas limité au Burundi. En tant que président de l’Association des Conférences épiscopales d’Afrique centrale pour le Burundi, le Rwanda et la RDC, l’évêque Simon Ntamwana a pu étendre son influence à l’échelle régionale. Cette position lui a permis de participer activement aux discussions sur la paix et la réconciliation dans l’ensemble de la région des Grands Lacs.

L’Église a identifié les politiciens comme étant souvent à l’origine des tragédies qui continuent d’affliger le continent africain. Elle critique leur tendance à privilégier leurs intérêts personnels au détriment du bien commun, devenant ainsi un obstacle au développement équitable de leurs nations. Malgré des rencontres avec les plus hautes autorités de différents pays africains pour exprimer ces préoccupations, le suivi de ces initiatives est resté limité.

Néanmoins, l’Église perçoit des opportunités pour la paix et la réconciliation. Elle souligne l’importance d’une population jeune porteuse d’une vision de réforme, et le rôle crucial des églises chrétiennes dans la promotion de la paix. L’Église insiste également sur l’importance de la famille dans l’éducation des jeunes, la considérant comme un fondement essentiel pour construire une société pacifique.

Les défis restent nombreux, notamment les divisions ethniques qui entravent l’unité nationale, l’accès limité à l’éducation pour certains enfants, et la pauvreté qui demeure un obstacle majeur à la paix. Face à ces défis, l’Église appelle à la réconciliation et à l’unité, les considérant comme la voie vers le développement et la coopération.

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